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Chizin Rabten : peintre de catégorie A et fondateur d'une école au Tibet

2019-08-05 15:18


L'école de Thangka de Xiangzang, située dans le comté de Songpan.

Pendant dix ans, Chizin Rabten, peintre de catégorie A au Tibet (le plus haut niveau au Tibet), est passé d'élève à fondateur d'un centre de thangka (école). Dans les sept ans à venir, il prévoit de se concentrer sur le développement de l'école dans sa ville natale et sur la transmission de l'art de thangka.

Le 5 juillet dernier, une école caritative, qui se trouve entre la ville de Lhassa (région autonome du Tibet) et le comté de Songpan (préfecture autonome tibétaine et qiang d'Aba dans la province du Sichuan), a finalement ouvert ses portes. Une trentaine d'élèves y suivront des cours de thangka pendant sept ans.


Chizin Rabten dessine un thangka.

Témoin direct de la construction de l'école, Chizin Rabten a déclaré qu'il n'était possible d'avoir plus de talents en peinture de thangka et d'en faire bénéficier davantage de personnes qu'à travers l'éducation et la formation.

De Mayi à Kangding : il n'a jamais pensé à devenir peintre de thangka

En 1979, Chizin Rabten est né dans une famille ordinaire d'agriculteur-éleveur dans le village de Mayi. Petit, il contemplait souvent les peintures de thangka de ses ancêtres, qui l'ont impressionné dès son enfance.

Pendant les vacances d'été, lorsqu'il surveillait les troupeaux, il aimait utiliser la boue pour modeler des figurines de voitures ou de bêtes. En hiver, les grandes étendues de neige devenaient des toiles sur lesquelles il dessinait avec un bâtonnet.


Chizin Rabten consulte son professeur Dampa Rabten.

Jusqu'alors, Chizin Rabten n'avait jamais eu l'idée de devenir peintre de thangka. Il s'intéressait simplement au dessin. « C'est en 2002 que j'ai été admis dans la faculté de l'art de l'École de la langue tibétaine de la province du Sichuan. A ce moment-là, j'ai commencé à réfléchir si je devais mener une carrière dans la peinture. »

Au bout de trois ans d'apprentissage de la peinture de thangka dans l'école Gamagachi, le future diplômé Chizin Rabten a eu une idée d'approfondir ses connaissances en thangka, cette fois-ci dans le Qinghai.


Chizin Rabten suit des études à l'étranger.

Du Qinghai à Lhassa: un rêve qui devient réalité

A Regong, dans la préfecture autonome tibétaine de Huangnan, au Qinghai, Chizin Rabten n'avait pas de professeur fixe avec qui apprendre les techniques de l'école Miantang. Il a été obligé de consulter différents maîtres afin de maîtriser les différentes méthodes.

Heureusement, ses compétences déjà acquises lui ont permis de passer de la peinture de l'école Gamagachi à celle de Miantang.

Deux ans plus tard, Chizin Rabten estimait que c'était le moment de se rendre à son endroit rêvé : Lhassa.


L'oeuvre (partie) de Chizin Rabten intitulée « Les dragons ». Sur l'image, un dragon femelle sort de la mer et offre une conque, synonyme de la voix, au Bouddha Arbre Dragon (en haut à gauche) afin de transmettre le souhait des êtres humains de la protection de la nature et de la coexistence harmonieuse avec elle.

 « Depuis le moment où je suis parti de ma ville natale, aller à Lhassa est devenu mon rêve. » Cette volonté est devenue encore plus ferme quand Chizin Rabten s'est initié au style de l'école de Miantang. « Si on veut se perfectionner, on est obligé de se tourner vers un endroit riche en histoire et culture. Compte tenu de l'origine de la peinture de thangka, Lhassa était la destination idéale. »

Par conséquent, après le Nouvel An tibétain de l'année 2007, Chizin Rabten a commencé un long voyage. Sa destination est là où se trouve la « racine » de la peinture de thangka.

D'élève à maître : la poursuite de l'art ne se termine jamais

Arrivé à Lhassa, Chizin Rabten a continué son apprentissage auprès de Cidan Langjie, un célèbre peintre de thangka.

Chizin Rabten se rappelle qu'à l'époque, « chaque jour a été intensément programmé. Il fallait marcher très vite. » Généralement, ses activités étaient de peindre chez son professeur Cidan Langjie de 9h à 13h, puis d’aller faire les courses et faire la cuisine à la hâte, ensuite d'apprendre l'anglais de 14h à 15h30, et de revenir chez son professeur pour peindre jusqu'à 18h ou 19h.

En 2009, en étudiant plus profondément les techniques de thangka, Chizin Rabten a commencé à former ses propres élèves. En 2010, la dixième année de sa carrière dans la peinture de thangka, il a été qualifié comme peintre de catégorie A lors de la première édition de l'Exposition de l'art de thangka du Tibet. La même année, il a créé le Centre de Thangka de Xiangzang à Lhassa.


Des élèves du Centre de Thangka de Xiangzang créent des thangkas.

La plupart des étudiants du Centre de Thangka de Xiangzang sont originaires du Tibet. Ils y suivent une formation de 7 ans, dont les 3 premières années sont dediées à l'apprentissage des théories fondamentales de la peinture, les 3 années suivantes à la pratique des techniques traditionnelles sur la peinture de thangka, la dernière année à la création de leur œuvre finale et au mémoire avant la remise du diplôme.


Une œuvre de Chizin Rabten intitulée « Le premier roi de Xiangxiong ». Elle est conservée dans le Musée de la Cité interdite de Taipei depuis 2015.

De Lhassa à Songpa : la transmission est l'essence de la culture

Chizin Rabten s'est encore éloigné de sa ville natale. Mais il y retourne une ou deux fois chaque année. Chaque fois, il y fait de nouvelles découvertes.

Par exemple, le village qui se situe près de l'aéroport de Jiuzhai Huanglong s'est développé grâce au tourisme. Les locaux en bénéficient. Le développement de la culture, lui, stagne.

Chizin Rabten pense que les talents sont la clé de la transmission de la culture traditionnelle. « Les oeuvres ne sont pas primordiales, mais la transmission de la peinture de thangka l'est », estime Chizin Rabten.

En 2012, il a commencé à créer une école.

Pour financer la construction de l'école, Chizin Rabten a versé tout l'argent qu'il a gagné par la vente de ses oeuvres. Cela était néanmoins insuffisant. C'est pour cela que quand les gens lui commandaient des thangkas, il exigeait un paiement préalable.


En août 2015, Chizin Rabten est revenu à Songpan pour en savoir plus sur l'avancement des travaux de l'école.

De 2012 à 2017, le bâtiments d'enseignement, le dortoir, la bibilothèque et les salles multi-fonctionnelles ont été sucessivement achevés. En septembre 2018, l'École de Thangka de Xiangzang, qui est également la base de transmission et de formation de thangka, a officiellement été dévoilée au grand public. Le 5 juillet 2019, une trentaine d'élèves ont commencé à apprendre la peinture dans cette école.


L'école de Thangka de Xiangzang en construction.

Chizin Rabten déclare : « La construction d'une telle école est l'investissement d'une vie. Il reste du chemin à faire. » Une école purement caritative demande un financement continu afin d'assurer son bon fonctionnement. C'est un processus ininterrompu. Chizin Rabten espère que l'école pourra se développer comme il le souhaite et que cet héritage culturel immatériel sera transmit à Songpan, sa ville natale.


Chizin Rabten (à droite) enseigne aux élèves au Centre de Thangka de Xiangzang de Lhassa.


Le Centre de Thangka de Xiangzang de Lhassa.

(Rédactrice : Claire SHENG)