Qu'il s'agisse d'employer des techniques biotechnologiques ou de déployer une gamme de machines automatisées alimentées par l'IA, la Chine a cherché activement à adopter des innovations pour remplacer le travail manuel intense et pénible, dans ses efforts pour fabriquer des barrières écologiques contre la désertification.
Le 17 juin marque la Journée mondiale de lutte contre la désertification et la sécheresse. Souvent décrite comme le "cancer de la terre", la désertification est un problème mondial qui touche plus de 100 pays et régions. La Chine, l'un des pays les plus sévèrement touchés, a réalisé des progrès considérables pour interrompre l'expansion du désert grâce à une campagne de boisement déployée depuis des décennies.
Sinuant parmi d'imposantes dunes en bordure du désert de Tengger - le quatrième plus grand de Chine - le chemin de fer Lanzhou-Baotou, construit en 1958, est non seulement resté bien entretenu et à l'abri du sable au fil des décennies, mais a également contribué à transformer le paysage aride. Ses brise-vent ont favorisé la croissance d'une biocroûte, apportant ainsi une nouvelle vie à cette terre autrefois désolée.
La ceinture verte qui protège cette artère de transport vitale est un quasi-miracle dans ce paysage aride. Au cours des 60 dernières années, des efforts humains considérables ont été déployés dans la ville de Zhongwei, située dans la région autonome Hui du Ningxia (nord-ouest), pour créer le "damier de paille", une technique de stabilisation des dunes qui consiste à disposer de la paille en damier à la surface du désert. Ces grilles ont ainsi permis à la végétation de s'enraciner et de transformer progressivement le sable en une étendue de verdure.
Surnommée le "Rubik's Cube chinois", cette technique est aujourd'hui largement adoptée en Chine comme à l'étranger pour augmenter la rugosité de la surface du sol et réduire efficacement l'érosion causée par le vent dans les zones sablonneuses.
A l'intérieur de ces damiers, la surface du sable forme progressivement une croûte solide qui aide à prévenir les mouvements provoqués par le vent. Pour accélérer ce processus, des chercheurs chinois ont mis au point des cyanobactéries cultivées en laboratoire qui accélèrent la formation de ces croûtes de sol biologiques.
"Dans des conditions naturelles, la formation de croûtes de sol biologiques prend de 10 à 20 ans. Grâce aux cyanobactéries, ce processus peut être réduit à un an seulement", indique Zhao Yang, chercheur à l'Institut de l'éco-environnement et des ressources du Nord-Ouest de l'Académie des sciences de Chine.
Cette technologie a été appliquée sur une superficie de plus de 267 hectares dans le Ningxia, et sa couverture continuera à s'étendre à l'avenir, ajoute-t-il.
En pulvérisant un liquide cyanobactérien sur la surface du sable et en l'associant à la technique du "damier de paille", il est possible de former des croûtes de sol biologiques artificielles stables en l'espace de 10 à 16 mois. Dans les zones traitées, l'érosion causée par le vent a été réduite de plus de 95%, le taux de survie des arbustes fixant le sable a augmenté de 10 à 15% et le besoin de remplacer les semis a chuté de près de 40%, ce qui réduit considérablement le coût global de la lutte contre l'ensablement, explique M. Zhao.
Tang Ximing, ingénieur en chef à la ferme forestière d'Etat de Zhongwei, rappelle qu'auparavant, les températures estivales au sol pouvaient atteindre jusqu'à 70 degrés Celsius, ce qui engendrait un taux de survie des jeunes arbres dans les ceintures vertes d'à peine plus de 40% dans les zones boisées.
En 2023, M. Tang a inventé un dispositif de forage électrique qui permet aux ouvriers de planter des jeunes arbres dans une couche de 50 centimètres de sable humide à l'intérieur des damiers en moins de 10 secondes. Auparavant, même les travailleurs forestiers qualifiés avaient besoin de trois à quatre minutes pour creuser manuellement une seule fosse d'arbre.
Dans la ville d'Ordos, de la région autonome de Mongolie intérieure (nord), un système intelligent intégré a été mis en place, comprenant un réseau télécommandé de surveillance de la désertification avec des données en temps réel provenant de la télédétection par satellite, de l'arpentage par drone et de capteurs au sol. Ce système, permet une surveillance précise d'indicateurs dynamiques tels que la couverture végétale et les niveaux d'humidité du sol dans les zones de boisement.
Pendant ce temps, dans la ceinture verte qui entoure les terres sablonneuses de Hunshandake - la menace de désertification la plus proche de Beijing - des machines à planter font continuellement la navette, posant des damiers et semant des graines de gazon, rendant ainsi le reboisement du désert aussi efficace que le labourage d'une terre agricole.
"La création de barrières de paille et l'ensemencement de graines de gazon étaient autrefois deux étapes manuelles distinctes dans la plantation. Aujourd'hui, la nouvelle machine combine les deux processus", déclare Wang Lei, directeur de l'institut de recherche sur les équipements intelligents de la M-Grass Ecology and Environment (Group) Co., Ltd, société basée en Mongolie intérieure.
Il ajoute que ces appareils intelligents sont près de 20 fois plus efficaces que le travail manuel.
(Rédactrice : Lucie ZHOU)