En mars, le froid printanier persiste encore à Shigatse, mais dans la maison de Migmar Dondrup, située dans le village de Chusong, dans le canton de Nyarixung, comté de Sangzhuzi, une ambiance chaleureuse règne. À travers le toit en verre, la lumière du soleil inonde la pièce, se mêlant aux mélodies des chants tibétains diffusés à la télévision, illustrant un portrait de la vie heureuse des familles tibétaines modernes.
Dans la cuisine, Dawa, l'épouse de Migmar Dondrup, prépare du thé au beurre en ajoutant du beurre de yak, du sel, du thé infusé dans une théière électrique flambant neuve de la marque Xuelianhua. « Nous buvons une grande théière de thé au beurre tous les jours. » Se tenant près de la théière électrique, elle se souvient : « Avant, nous devions baratter le beurre dans un tonneau en bois, c'était très fatigant. Maintenant, il suffit d'appuyer sur un bouton. » En quelques instants, un thé au beurre onctueux a été prêt.
Migmar Dondrup (premier depuis la droite) entouré de sa famille.
Dawa verse le thé fumant dans le bol en bois incrusté d'argent de Migmar Dondrup, typique de la culture tibétaine. Quand Migmar Dondrup prend le bol et sent sa chaleur, il ne peut s'empêcher de se remémorer les quatre générations de barattes à thé au beurre précieusement conservées dans sa famille :
Celle-ci est une baratte en bois patinée par le temps,
Voici une baratte électrique de la marque « Yak », dont la peinture est écaillée,
Quant à celle-ci, c'est une baratte couleur cuivre avec l'inscription « offerte par une délégation du gouvernement central ».
Et enfin, il y a cette théière entièrement automatique de la marque Xuelianhua, spécialement conçue pour les hautes altitudes.
Ces quatre générations de barattes que l'on trouve chez Migmar Dondrup, bien plus que de simples outils pour préparer le thé, sont le témoignage concret des immenses changements qu'a connus la population tibétaine au cours des 66 années depuis la réforme démocratique du Xizang.
Migmar Dondrup présente l'ancienne baratte en bois.
« Quand j'étais enfant et que j'allais à l'école, ma mère se levait tôt chaque matin pour préparer du thé au beurre », raconte Migmar Dondrup, aujourd'hui âgé de 60 ans. « À l'époque, nous vivions dans des conditions difficiles, mais même quand le beurre manquait, elle en étalait une fine couche sur le thé clair. Jamais je n'aurais imaginé qu'un jour, on pourrait faire du thé au beurre en appuyant simplement sur un bouton de la théière. »
Aujourd'hui, ce tonneau en bois qui a servi la famille pendant près de quatre générations est soigneusement exposé sur une étagère du salon, aux côtés d'une ancienne balance et d'un seau à tsampa, vestiges silencieux des difficultés du passé. « Ces objets appartenaient à mes parents, j'ai moi aussi bu du thé préparé dans ce vieux tonneau », rapporte-t-il.
Avec l'amélioration des infrastructures électriques, la qualité de vie des habitants s'améliore nettement, peu à peu, les tonneaux en bois ont disparu du décor, remplacés par des barattes électriques. La première baratte électrique de la famille de Migmar Dondrup a également fait son apparition.
« Quand notre village a eu accès à l'électricité, je suis allé en ville à Shigatse pour acheter une baratte électrique de la marque ‘Yak' », se souvient-il. « Il suffisait d'appuyer sur un bouton, et le thé était prêt. C'était tellement pratique et bien meilleur au goût ! » L'introduction de barattes électriques a non seulement allégé le travail, mais aussi amélioré la qualité du thé au beurre, rendant cette boisson traditionnelle plus accessible au quotidien.
En 2015, à l'occasion du 50ᵉ anniversaire de la fondation de la région autonome du Xizang, la famille de Migmar Dondrup a reçu une une baratte électrique spéciale, portant l'inscription « offert par une délégation du gouvernement central » en tibétain et en chinois, ce qui donne une tout autre dimension à ce don. Né la même année que la région autonome, Migmar Dondrup conserve précieusement cet objet symbolique.
Cette année, grâce au programme gouvernemental d' « échange d'équipements anciens contre du neuf », il a fait l'acquisition d'une théière automatique de la marque Xuelianhua. « Il y a des subventions de l'État pour cet appareil isotherme très pratique. » indique Migmar Dondrup.
De rien à l'existence, de l'existence à l'excellence, les quatre générations de barattes de la famille de Migmar Dondrup illustrent le développement spectaculaire du Xizang. Aujourd'hui, chez lui, le parfum du thé ne cesse de flotter, du matin au soir : thé au beurre au petit matin, thé sucré l'après-midi, et thé simple en soirée. Sa vie de retraité est bien agrémentée : après avoir déposé ses petits-enfants à l'école, il rejoint ses amis de toujours pour danser le guozhuang, une danse traditionnelle tibétaine, après avoir bien dansé, ils se retrouvent en petit groupe dans un salon de thé ensoleillé, pour bavarder sur le train-train de la vie.
La cuisine de Migmar Dondrup avec sa baratte électrique, son cuiseur à riz et d'autres appareils électroménagers.
En 66 ans, le Xizang a connu une transformation radicale, le plateau enneigé s'est métamorphosé : des chemins de terre cahoteux aux autoroutes en asphalte bien connectées, des barattes en bois où il fallait baratter en courbant le dos aux barattes automatiques, de l'analphabétisme des générations passées aux diplômes universitaires de la nouvelle génération... Aujourd'hui, la population tibétaine avance à grands pas, aux côtés de tout le pays, sur la grande voie d'une prospérité partagée.