En tant que patrimoine culturel mondial, le Palais du Potala constitue une composante essentielle de la splendide culture de la nation chinoise ainsi qu'un précieux héritage culturel partagé par l'humanité tout entière. Parmi les centaines de milliers d'objets précieux conservés au Palais du Potala, on compte près de 50 000 statues de style varié du bouddhisme tibétain, couvrant une période allant du Ve siècle au XXe siècle, ces œuvres témoignent des liens étroits entre le Xizang et la mère patrie, ainsi que des interactions et de l'intégration entre les différentes ethnies.
Le 8 mai, à l'Institut des beaux-arts de l'Université du Xizang, une conférence sur la problématique des statues de la période Yongle-Xuande conservées au Palais du Potala a attiré de nombreux passionnés d'érudition. Le professeur Palden Tsering, appartenant à l'équipe de recherche du service de gestion des reliques culturelles du Palais du Potala, a présenté au public, à travers de nombreux exemples de statues de la dynastie des Ming de la période Yongle-Xuande, comment ces statues ont agi comme vecteur pour renforcer un sentiment d'attachement entre les différentes ethnies.
La salle de conférence
Qu'est-ce qu'une statue Yongle-Xuande ?
« Les statues Yongle-Xuande font référence à des œuvres fondues par la cour impériale pendant les règnes Yongle et Xuande de la dynastie des Ming, elles étaient destinées à être offertes aux élites tibétaines et aux grands monastères, et étaient votives dans les palais impériaux, enchâssées de l'inscription « Offert durant l'année Yongle de la dynastie des Ming » ou « Offert durant l'année Xuande de la dynastie des Ming ». Leur finesse d'exécution et leur rareté en font des objets très prisés par les universitaires et les collectionneurs. »
Une pièce de la collection du Palais du Potala (à gauche) produite à l'époque Yongle-Xuande (illustration tirée de la conférence de Palden Tsering).
Comment ont-elles achevé leur parcours au Xizang ?
« Les premières statues bouddhiques du Palais du Potala remontent à la dynastie des Wei du Nord. Dans le hall des bouddhas en bronze du Potala, se trouvent plusieurs statues précieuses bouddhiques de la période des Wei du Nord (386–534 ap. J.-C.), dont un Maitreya fondu la troisième année de Heping de cette période (462 ap. J.-C.), un Shakyamuni datant de la troisième année de Yanxing (473 ap. J.-C.), et une statue debout reprenant la statue de Bouddha de la huitième année de Taihe (484 ap. J.-C.). Cela montre que, dès les premiers échanges et mouvements de population entre les territoires hans et tibétains, de nombreuses statues bouddhiques étaient déjà parvenues jusqu'au Xizang. »
Palden Tsering explique : « Afin d'assurer la sécurité des frontières et la stabilité nationale, la dynastie des Ming qui a poursuivi sa politique de soutien au bouddhisme tibétain de l'école Sakya initiée par les Yuan, a étendu son appui aux écoles Gelug, Kagyu, etc., adoptant la stratégie de « multiples titres et constructions » pour pacifier la région, invitant des moines de haut rang du bouddhisme tibétain à la cour, leur attribuant des fonctions officielles, des titres honorifiques et de nombreux dons, dont une grande quantité de statues Yongle-Xuande. Celles-ci portent généralement les inscriptions « Offert durant l'année Xuande de la dynastie des Ming » ou « Offert durant l'année Yongle de la dynastie des Ming ». La distinction entre les termes « offert » et « fabriqué » révèle la nature des relations entre le gouvernement central de la dynastie des Ming et le Xizang. »
Inscription de statues Yongle-Xuande conservées au Palais du Potala (image tirée de la conférence de Palden Tsering)
Comment ces statues se sont-elles transmises jusqu'à aujourd'hui ?
Les statues offertes par la cour de la dynastie des Ming au Xizang étaient appréciées par les élites tibétaines locales pour leur qualité exceptionnelle. Au fil du temps, ces statues produites à l'époque ont aussi été échangées entre nobles tibétains et populations voisines, devenant des cadeaux de prestige, certains de ces échanges sont soigneusement documentés dans des archives et ouvrages anciens, fournissant une base pour les études ultérieures sur la diffusion des statues Yongle-Xuande au Xizang.
« Si ces statues peuvent témoigner des échanges et des interactions ethniques, c'est en grande partie grâce à leur valeur artistique unique. Tant par leurs thèmes que par leurs styles, elles intègrent des éléments esthétiques provenant de différents groupes ethniques. Cela a été possible parce que les statues de Yongle-Xuande n'ont pas seulement été créées par des artisans de la cour impériale, mais ont également impliqué la participation d'artisans tibétains. On peut dire que la création des statues Yongle-Xuande résulte d'un métissage des caractéristiques esthétiques de différents groupes ethniques, imprégnée d'une profonde émotion collective. C'est pourquoi, lorsque ces statues sont arrivées au Xizang, elles ont été largement acceptées par toutes les couches de la société tibétaine, de nombreuses statues bouddhiques sont même devenues les principales divinités vénérées dans les temples qui les ont reçues en don. » ajoute Palden Tsering. « À l'époque Qing, certaines de ces statues de Bouddhas furent offertes en retour par les élites tibétaines à la cour impériale. L'empereur Kangxi, admiratif de ces œuvres, ordonna leur reproduction pour célébrer l'anniversaire de sa mère. Ce processus illustre la continuité des échanges culturels et ethniques, c'est aussi ce qui donne tout son sens à mes recherches. » complète-t-il.
Itinéraire de la transmission d'une statue portant l'inscription Yongle-Xuande de la collection du Palais du Potala (illustration tirée de la conférence de Palden Tsering)
En conclusion de sa conférence, Palden Tsering rappelle que dès le XVe siècle, les élites tibétaines reconnaissaient clairement la valeur des statues Yongle-Xuande, au point d'en reproduire à foison à différentes périodes historiques, ce phénomène témoigne d'une reconnaissance profonde de la politique, de la culture, de l'art, et d'autres domaines de la région de la Plaine centrale. Grâce aux efforts constants de l'État pour protéger et valoriser les reliques culturelles, notamment à travers d'intenses campagnes préalables d'inventaire et d'archivage, de nombreux objets précieux et historiques sont aujourd'hui enfin dévoilés au grand public.
(Rédactrice : Lucie ZHOU)